Les conséquences

De Wikirak

L'impact du raccourcissement sur la bataille finale

S'il est clairement démontré que la série a été raccourcie suite au découragement de Popy, de nombreux indices nous permettent de penser qu'elle était prévue pour durer au moins 78 épisodes.

L'idée d'une grande bataille finale, épique, au Camp de la Lune noire ne verra jamais le jour dans le feuilleton. Pourtant, elle a maintes fois été dessinée sur des posters et des illustrations d'époque et servira de conclusion à deux versions du manga, celle d'Imamishi pour TV-Land et celle d'Okazaki pour TV-Magazine.

Tout cela tend à montrer que c'était bien l'idée de départ.

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Au lieu de cet arc final espéré et attendu qui, à l'instar des prédécesseurs de la série, se serait étalé sur cinq ou six épisodes, une fin bâclée et brutale est bricolée dans l'urgence. En effet, trop de choses se passent en trop peu de temps, parfois en dépit du bon sens et le résultat se révèle très frustrant pour ceux qui ont aimé la série. "Non, ça ne peut se terminer comme ça" est la phrase qui reviendra le plus souvent après la toute première vision du dernier épisode.

Une guérison miracle

Quant à la guérison d'Actarus, sujette elle-aussi à de grandes interrogations, il semble qu'elle fut également prévue dès qu'il a été décidé de faire de lui un condamné à mort à plus ou moins brève échéance.

Si bien sur on peut voir dans cette ficèle le désir d'ajouter de la tension dramatique à l'histoire, elle répond aussi à un besoin, une attente : En affaiblissant Actarus, on entrouvre une brèche à l’idolâtré Koji/Alcor et on peut le faire monter en puissance aux côtés du héros. Le Double Spacer, puisque le retour d'un Mazinger est impensable, est donc créé pour lui et il se retrouve alors vraiment au front, partageant ainsi les mêmes risques et remportant les mêmes victoires que son "frère de l'espace". L'Alcorak, comme le seront les 2 autres appareils des filles, est à Goldorak, en bien plus puissant, ce que le Jet Scrander était à Mazinger Z... Ce retour au premier plan du fils Kabuto ne gonflera hélas pas l'audience (toujours très bonne néanmoins) et ne redressera pas la courbe des ventes des produits dérivés.

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Impactée par le raccourcissement du feuilleton, cette guérison surprenante arrive peut-être un peu plus tôt et n'est sans doute pas aussi bien amenée qu'on la voulait. Cependant, il ne fait presqu'aucun doute que le Prince devait finir la série sain et sauf, afin de respecter le film que la série adapte, même si, dans le souci d'entretenir le suspense, certaines scènes de l'épisode 73 (Actarus, résolu à se sacrifier et faisant des adieux à peine voilés à ses proches) ont pu laisser croire le contraire.

Si, à cette époque, on avait déjà vu des héros mourir à la fin de l'histoire, c'était principalement dans des récits historiques et sportifs, bien loin des récits de science-fiction où la figure principale du dessin animé est aussi le premier, voir le seul, défenseur du bien.

Actarus ayant retrouvé la santé, il fallait faire coûte que coûte mourir les envahisseurs, et rapidement, car il ne reste désormais qu'une heure d'animation à offrir aux téléspectateurs, bien loin du minimum de 140 minutes prévues. Cela implique d'énormes coupes et simplifications dans le récit, ce qui se fait, bien évidemment, au détriment de la qualité de l'histoire et de l'animation.

Un empire qui s'écroule

C'est donc en toute logique que l'épisode 72 présente la première véritable déviation par rapport à la fin originellement prévue. Nous y apprenons, alors que rien ne le laisse penser tout au long de la série, que l'empire de Véga chancelle et que des rebellions sur les planètes conquises existent et se retrouvent victorieuses. Il présente aussi la renaissance d'Euphor en tant que planète propice à la vie, ce qui montre que le retour du héros sur sa terre natale, conclusion assez proche de UEDS dans laquelle Actarus quitte la Terre pour d'autres raisons, était sans doute lui aussi prévu de longue date. Le thème du héros étranger repartant dans sa mère-patrie une fois la paix rétablie sur sa terre d'adoption est d'une utilisation fréquente, Spectreman, encore une fois, en est un bon exemple.

La présence du Cosmorak, indispensable à la grande bataille au Camp de la Lune Noire, devient dans les faits inutile, puisque Véga se rend de lui même sur Terre pour un suicidaire assaut final que seul son désordre mental justifie, montrant bien que le scénario fut réécrit dans l'urgence absolue et que certaines décisions ont été prises sous cette pression.

Le destin de Véga est alors scellé dans une logique un peu restrictive : Il est mort, sa garde rapprochée aussi mais la victoire n'est pas totale car, loin dans l'espace, son empire n'a pas (encore) été anéanti. Cette fin est un peu le pendant négatif de Great Mazinger, où le chef des méchants n'est pas éliminé mais où tout le reste de son empire est annihilé.

Le temps de faire les comptes

Seuls les producteurs, pressés d'en finir avec Goldorak, se satisferont de ce final, avec un arrière goût de victoire totale qui n'en est pas une.

L'aventure est terminée...

Si à cette époque on peut estimer à huit semaines (sans doute moins) le temps de conception et de réalisation d'un épisode, il faut en conclure que le sort de la série a été scellé lors du dernier mois de 1976 et que c'est à ce moment que la Tôei et Leiji Mastumoto ont, en partant de zéro, commencé à travailler sur Danguard Ace.

Financièrement, le grand gagnant de cette aventure est Gô Nagai, qui a fait sa modeste part tout en étant payé (les conséquences de la vente de Grendizer à l'étranger sont un autre sujet). De plus, conséquence des négociations ayant eu lieu lors de La conception de la série, l'histoire, avec tous les personnages, lieux et machines y apparaissant, est légalement considérée comme son œuvre et est donc sa propriété. En effet, nos échanges récents avec le Japon nous ont prouvé que le mangaka peut faire absolument tout ce qu'il veut avec cet univers et que la Tôei doit obtenir son accord pour toute opération commerciale qu'elle lance sur la série. La rareté des apparitions ultérieures du Prince et de son robot n'est donc due qu'à la volonté de Nagai puisqu'il est libre de l'adapter en dessin animé avec tout autre studio d'animation.

La station de télévision Fuji TV, qui a diffusé une série aux taux d'audience très satisfaisants pour un dessin animé de science-fiction, est aussi dans le camps des vainqueurs.

Le perdant est Popy, le sponsor et principal financier du feuilleton, qui se retrouve avec une multitude de figurines invendues.

La Tôei, elle, payée à la minute, n'a pas beaucoup souffert mais comme son produit final fut une mauvaise affaire pour le fabriquant de jouets, cela a dû lui être reproché et mettre à mal sa fierté et peut-être de futurs contrats.


Des coups bas

Les vexations entre Dynamic et Tôei Animation datant de l'arrêt de Mazinger Z et de la création de UEDS étant encore toutes fraiches, les relations se tendent.

Le premier coup est porté dès 1976, alors que Grendizer n'en est qu'à son premier tiers. Gô Nagai n'est crédité par la Tôei pour sa participation que pour les quatre premiers épisodes de la série Gaiking, qui débute en avril. Au delà, son nom passe à la trappe. La déception issue de Grendizer aurait-elle écorné l'image du mangaka auprès du studio ? Est-ce une vengeance ? C'est bien possible au vu de L'échec commercial au Japon dont ni l'un, ni l'autre, ne sont pourtant responsables et qui de plus n'est même pas vraiment un échec. Go Nagai, par son droit de regard sur le scénario et son aura auprès des marchands de jouets, a-t-il alors empêché la Tôei d'emmener la série là où elle le voulait et a t-il tenté de la narguer ?

Malgré cela, la fracture met un peu de temps à se faire, ce qui permet aux deux parties de finaliser un ou deux projets anecdotiques en cours.

Puis les premières grosses colères éclatent et c'est la fin de la coopération entre les deux studios. La situation va vite tourner au vinaigre. En effet, pendant des années, les deux compagnies se feront des coups bas qui se termineront parfois devant les tribunaux, avant de finalement se décider à retravailler ensemble, très longtemps après.

Immédiatement, la Tôei va revoir sa façon de traiter les "scénarios maison", afin que ce soit toujours la compagnie qui soit créditée et non un auteur extérieur appelé à la rescousse sur un projet en cours.

Pour Grendizer, ce désenchantement va jusqu'au ressentiment entre certains acteurs qui se rejettent la faute (les erreurs commises plus tard par les détenteurs de la licence à l'étranger n'arrangeront pas les choses). Mais personne n'a osé dire à Popy qu'elle a surproduit, ce qu'elle sait, bien sûr. Les profits engendrés par le marché européen lui rendront sans doute le sourire à la fin de l'année suivante : les volumes de vente en France et en Italie atteignant des chiffres extravagants. Mais pour l'instant, elle ne peut que se l'avouer, cette affaire est ratée et la série est à oublier!


La fin d'un univers

Tous ces comportements ont empêché par la suite toute réalisation d'une nouvelle série ou bien d'un long-métrage remodelant le feuilleton, ce qui aurait sans doute permis d'écouler quelques jouets.

En effet, nous avons de nombreux exemples où des œuvres ayant premièrement connu l'échec sont devenues populaires par un remake au cinéma ou une suite quelques années plus tard, Yamato et Gundam étant les deux exemples les plus frappants.

Nous pensons que les différentes parties, devant le succès immédiat de Mazinger Z, se sont mises d'accord sur la possibilité de créer des suites ultérieures, mais il nous est impossible d'en connaitre le nombre, si toutefois il fut un jour fixé. Cette optimiste prudence aurait simplifié la création de Great Mazinger et Ufo Robo Grendizer tout en faisant taire les voix discordantes. Abondant dans ce sens, de récentes découvertes nous laissent deviner qu'au moins un quatrième volet fut un temps envisagé. Grendizer et Duke Fleed devaient-ils être de la partie? Nous l'ignorons totalement pour l'instant. La brouille entre la Tôei et Dynamic, d'un coté, et le découragement de Popy pour qui cet univers a vécu, d'un autre, feront que les trois sociétés en resteront là. En tout cas, ce quatrième volet, Go Nagaï l'a débuté en manga et l'a nommé Garla, sans toutefois faire le moindre lien scénaristique avec les Mazinger (voir l'image ci-dessous) mais l'a abandonné avant sa conclusion.

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La nostalgie au secours de Goldorak

Il aura fallu attendre près de vingt ans pour voir Bandai sortir à nouveau des jouets à l'effigie de GOLDORAK, suite à l'émergence des Otakus, que la compagnie voit grossièrement comme des acheteurs compulsifs, et de la vague nostalgique des salary-men désormais trentenaires mais surtout grâce à l'extraordinaire succès des jeux vidéo "Super Robot Taisen".

En revanche, pour d'autres robots, dont Mazinger Z et Raydeen, la production n'a jamais vraiment cessé, même s'il ne s'agissait plus de vendre aux masses mais à une niche de passionnés. Des séries "limitées" ont régulièrement paru comme la belle ligne de maquettes de super-robots en 1983. Si on retrouvait les deux héros cités ci-dessus ou Baldios, il n'y avait bien sûr pas de Grendizer.

La sortie fin 2017 de Mazinger Z Infinity, film d'animation issu de cette coopération remise au goût du jour entre Tôei et Dynamic, semble indiquer que les relations se sont apaisées et que de nouveaux projets renaissent. Goldorak, plébiscité en Europe comme dans les pays arabes et au Québec, pourrait alors revenir sur nos écrans avant 2020... Reste à savoir sous quelle forme.


Une interview récente de Go Nagai (au 13/11/2017)