Chapitre 16 : Une vision
d’horreur.
Un léger bruit leur parvînt de la chambre voisine. Visiblement, Zgrum-zgrums et Îrùclæd étaient réveillés. Ce dernier, sentant que son cousin n’apprécierait pas de les voir à ce moment précis, empêcha l’adolescent de sortir. Horos ne répondit pas à Niji. Il se dégagea des bras de la jeune femme, sortit de la chambre, alla à la porte d’entrée et l'ouvrit. Elle en profita pour aller s’habiller. Un groom en livrée rouge entra en poussant un chariot. Quelques secondes plus tard, Niji sortit de sa chambre.
« Ho…
– réalisant que le groom était encore là, elle se reprit – Euh, Shiro ?!
– Il leva les yeux et lui sourit. Elle avait instantanément basculé en ‘mode Shiro’ en voyant qu’ils n’étaient pas seuls. Il la trouvait belle dans la robe blanche qu’elle portait même si celle-ci baillait étrangement. – Tu peux m’aider, s’il te plaît ?! … Je n’arrive pas à remonter la fermeture éclair de ma robe, toute seule ! »
Le groom, qui semblait apprécier cette vision autant que Horos, sortit en tenant fermement le billet de 100 francs dans sa main, l’œil souriant sous l’œil courroucé du Végan. Celui-ci se retourna ensuite vers la jeune femme et l’attira à lui pour l’enlacer et remonter sa fermeture éclair. Il posa ensuite ses mains sur les épaules de la Terrienne et la repoussa légèrement.
« J’aimerais que tu évites de te promener comme ça dans la suite. Je ne tiens pas à te partager avec les yeux de tous ces Terriens ! … Tu as vu le regard de celui-là ! J’avais envie de lui faire passer l’envie de t’admirer avec une décharge de lasernium. »
La jeune femme sourit à l'extraterrestre avant de se blottir à nouveau dans ses bras.
« Tu es jaloux, Horos ? … Tu sais, … Si ça se trouve, il se disait juste que tu avais de la chance d’avoir une jolie fille dans ta suite ! »
« C’est justement ce que je ne veux pas qu’ils pensent … Comprends-moi, tu es belle mais je veux juste être le seul à le penser ! »
« Dans ce cas, il faudra que tu tues Zgrum-zgrums !
– Horos fronça les sourcils tandis qu’elle se mordait les joues pour ne pas rire. Elle ajouta – Il me trouve jolie, lui-aussi ! »
Horos répondit à son sourire avant de lui demander, l’air suspicieux :
« Est-ce que tu l’aimes, Niji ? … Est-ce que tu aimes ÀçhùÎzaegrùms ? »
Hochant la tête, elle répondit à son sourire.
« Oui, je l’aime aussi ! Mais comme une mère peut aimer son enfant ! Je ne suis amoureuse que d’un seul extraterrestre à la fois ! … Et tu n’as pas de chance, c’est sûr toi que c’est tombé, Horos !
– Il rit et elle toucha ses lèvres du bout des doigts en ajoutant – Et là, je suis en manque de tes baisers ! »
Peu enclin à se faire prier à cet instant, l’homme de Véga colla délicatement sa bouche contre celle de la jeune femme. Leurs cœurs battaient à l’unisson quand leurs lèvres se séparèrent enfin.
« Tu t’améliores encore, mon amour ! C’est bien !
– chuchota-t-elle à son oreille quelques instants plus tard – On peut manger, maintenant ? »
Il lui sourit en s’écartant d’elle.
« Oui … Assieds-toi, je te sers ! …
– il commença à lui beurrer ses tartines et, le dos tourné vers elle pour qu'elle ne voie pas son émotion, il ajouta – Tu sais Niji, c’est un moment particulier, quand un homme et une femme partagent un repas ensemble pour la première fois ! »
« Mais pourquoi tu me dis ça, Horos ? Ce n’est pas la première fois qu’on mange ensemble ! La première fois, c’était pour l’anniversaire de Zgrum-zgrums ! »
« Non, excuses-moi, c’est moi qui me suis mal exprimé ! Je voulais dire, … quand ils le partagent en tête à tête ! C’est un moment spécial ! »
– Il se retourna et posa un plateau devant elle avant de se retourner de nouveau pour prendre le sien.
« Pourquoi ça ? »
– demanda-t-elle en léchant la confiture sur le pain beurré.
« Sur Arachnus, un repas partagé par un couple seul du début à la fin est équivalent à des fiançailles, Niji !
– lui expliqua Horos en posant son plateau aux côtés de celui de la jeune femme. Il passa ensuite derrière elle, l'enlaça de ses bras et déposa un baiser sur ses cheveux. – Est-ce que tu veux vraiment qu’on le partage en entier ? Est-ce que tu m’aimes assez pour te lier ainsi avec moi ? »
« Moi, je t’aime vraiment, Horos ! Et toi, tu veux de moi ou pas ? »
Après avoir pesé toutes les conséquences que pouvait avoir cet engagement, il lui répondit :
« Oui, Niji ! Je veux faire de toi ma compagne ! Même si le Stratéguerre n’approuvera jamais notre union ! »
« C’est pas à lui de décider qui tu aimes, mon chéri ! Comment tu vas faire pour qu'il ne se doute de rien ? »
Il réfléchit de nouveau pendant quelques secondes et ajouta :
« Je lui dirais que mon expérience avance bien ! Qu’est-ce que tu en penses ? »
« Je suis d’accord mais il faudra mettre Zgrum-zgrums et Îrùclæd dans la confidence ! Pour éviter qu’ils fassent une bourde ! »
« Je suis tout à fait d'accord pour que tu en parles à ÀçhùÎzaegrùms. Pour Îrùclæd, je m’en chargerai !
– Il ajouta à voix basse – Je t'aime, Arc-en-ciel ! »
Niji mit la tête en arrière, posant le sommet de son crâne sur la poitrine du Prince d’Arachnus, et le regarda. En souriant, elle se mordit légèrement la lèvre. Il se pencha en avant et l’embrassa de nouveau, cette fois avec toute la tendresse qu’il éprouvait pour elle à cet instant. Lui rendant son baiser, elle passa ses bras autour du cou de l’homme.
« Je t’aime aussi, Horos ! Je t’aime plus que ma propre vie ! »
Il ferma les yeux, soudain pris d’un sentiment de panique. Il la bâillonna doucement de la main.
« Ne me dis pas ça, mon Arc-en-ciel ! Je refuse de t’entendre dire ces mots-là, tu entends ! Je t’aime trop pour le supporter ! Si mon plan avait parfaitement fonctionné, … je veux dire, … si je n’étais pas tombé amoureux de toi, … ces mots-là t’auraient condamnée ! Mon plan visait à te faire tomber amoureuse de moi pour ensuite t’envoyer te battre contre le Prince d’Euphor, utilisant ton affection pour obtenir ton sacrifice … Mais j’ai découvert que j’éprouvais un amour sincère pour toi … Toi qui, au départ, n’étais qu’une simple expérience scientifique, tu t’étais transformée en une expérience de vie inattendue ! Jamais je ne pourrais t’envoyer combattre mon ennemi … J’aurais trop peur de te perdre ! »
« Pourquoi est-ce que tu m’expliques ça maintenant, mon amour ? Tu crois que je ne savais pas ce que tu manigançais ?
– il allait lui répondre quand elle saisit sa main et l’attira vers la table. Elle continua, l'empêchant de continuer ses révélations – Viens plutôt t’asseoir et prendre ton petit déjeuner avec moi … À moins que tu ne veuilles plus de moi comme fiancée ! »
Il serra la main de la jeune femme dans la sienne et s'assit. Tout en commençant à déjeuner, il lui dit :
« Bien sûr que si, Niji ! Ma décision est prise, je n’ai pas changé d’avis depuis tout à l’heure ! »
« Ce serait dommage que tu changes d’avis, monsieur ‘je-mets-des-mois-avant-de-me-rendre-compte-que- ma-prisonnière-est-une-femme-qui-m'aime’ !
– plaisanta Niji, taquine. Luttant difficilement contre l'envie de rire qui le submergeait peu à peu, Horos fronça les sourcils et elle continua sur sa lancée. – Pourquoi tu as été aussi long à me dire ce que tu ressentais, à ton avis ? J’ai souvent cru que tu n’éprouvais rien pour moi ! »
« Je n’ai pas été si long que ça, Niji ! Nous nous sommes rencontrés il y a tout juste neuf mois ! Est-ce que tu es immédiatement tombée amoureuse de moi ?
– Elle eût une petite grimace plutôt affirmative et il continua, faisant mine de l'ignorer – Moi, j’ai commencé à éprouver une vague sympathie pour toi après que tu t'es réveillée de ton coma et que tu as commencé à suivre ton traitement. J’ai réalisé que mes sentiments envers toi changeaient peu à peu après que ta cabine a été fouillée. Mais je ne pensais absolument pas qu’il s’agissait d’amour jusqu’à une discussion que j’ai eu avec Îrùclæd il y a un mois ! Il m’a dit de comparer ce que je ressentais pour toi à ce que je ressentais pour ma femme et pour ma première fiancée ! »
Niji le regarda, interloquée.
« Tu veux parler d’Hérésia !? … C’était avant ou après que tu as été marié ? … Est-ce qu’elle était …
– Soudain, le Végan colla sa main sur le visage de la jeune femme. Il l’attira à lui et déposa un baiser au coin de sa bouche pour la calmer.
« C’était avant mon mariage. Îrùclæd la détestait … Il disait qu’elle m’utilisait pour se faire mousser. Il avait raison. Et moi, je pensais qu'il se trompait ... Finalement, je ne l’ai pas épousée : elle avait tenté d’assassiner le Stratéguerre et je n’avais pas envie de finir mes jours avec elle sur Akéreb ! Alors, j’ai épousé une autre femme et c'est avec elle que j'ai eu mes enfants. »
Niji s'étrangla à moitié en répétant :
« Ta cousine a voulu tuer votre chef ?
– Horos hocha la tête mi-amusé, mi-gêné – Le pauvre ! … Il est au courant que tu étais fiancé avec elle à cette époque ? »
« Oui, il le sait !
– Horos détourna la tête, espérant que Niji ne verrait pas qu'il bleuissait de nouveau. – Après cet incident, il a choisi cinq femmes, toutes partiellement arachniennes, parmi lesquelles j'ai dû décider laquelle deviendrait mon épouse ! Il aurait pu considérer que j'étais un parent proche de Hérésia et m'envoyer avec elle finir ma vie dans les mines d'Akéreb-la-Rouge ! Au lieu de ça, il m'a laissé me marier selon mes vœux avec une autre … Aïcila, ma femme, était ... peu importe. Tout ce qui compte, c’est que c'est avec elle que je m'entendais le mieux ! »
Son petit déjeuner terminé, Niji repoussa le plateau, approcha sa chaise de celle de l'homme de Véga et caressa le visage de celui-ci.
« Horos ! Ta femme, tu l'aimais ? Est-ce qu'elle était belle ? »
« Oui, je l'ai aimée, tendrement aimée ! Elle …
– l'émotion fit perler une larme au coin de l'œil de Horos. Elle ne coula pas. – Elle était douce et sensible. Un peu comme toi !
– Il mit sa main dans la poche de sa tunique et en sortit une photographie qu'il montra à Niji. Elle représentait un jeune couple, visiblement amoureux. L'homme, qu'elle reconnût instantanément malgré la différence d'âge, tenait sa compagne par la taille et la regardait affectueusement. – C'est nous deux ! Quelques jours après notre mariage ! »
« Elle est plus belle que moi ! Comment tu as pu tomber amoureux de moi après l'avoir aimé ! Elle, elle a l'air d'une princesse ! »
« Sa robe y est peut-être pour beaucoup, Niji ! … Et ce n'est pas ton apparence qui m'a plu, au départ, mais ton intelligence et ta franchise ! C'est de cette partie de toi dont je suis tombé amoureux !
– il l'attira à lui et l'embrassa – Mais, maintenant, j'aime aussi beaucoup regarder … ton corps. »
Devinant que Horos avait failli dire autre chose, la jeune femme se pencha vers lui et lui murmura.
« Et moi, j'aime quand tu me regardes, Horos ! Prends-moi dans tes bras, mon amour. J'ai besoin de ton contact. »
Guidé par son instinct, il se leva, passa son bras droit sous les genoux de Niji et le gauche dans son dos et souleva la jeune femme qui se blottissait contre lui. Il l'emmena dans sa chambre, la déposant, assise, sur le lit avant d'embrasser son épaule. D'une main, il fît glisser la bride de sa robe et de l'autre, il descendit la fermeture éclair dans le dos de sa fiancée. Il goûta une fois de plus à ses lèvres puis, au même instant qu'elle, il dit :
« Je t'aime, Niji ! »
« Je t'aime, Horos ! »
Une minute plus tard, la porte de la chambre de Zgrum-zgrums s’ouvrit et, après avoir laissé un mot sur la table et glissé une pancarte 'ne pas déranger' à la poignée de la porte de Horos, les deux gardes sortirent déjeuner et faire quelques achats pour la journée.
*****
Horos et Niji s'étaient endormis dans les bras l'un de l'autre et rêvaient maintenant paisiblement. Il se retourna dans son sommeil et tout en rêvant, il posa sa main sur le ventre de la jeune femme …
Il l'avait épousé depuis plusieurs mois et maintenant, ils étaient prêts à devenir parents. Mais l'enfant qu'ils espéraient, il fallait qu'ils le conçoivent … D'ailleurs, c'était ce qu'ils étaient en train de faire à cet instant précis. Oui, il aimait celle qu'il avait choisie pour combler ses désirs de mâle. Il la serra dans ses bras … Un babillement enfantin le fît se retourner et il sourit en voyant son fils, qui se tenait debout mais instable devant lui. Il tendit les bras pour l'encourager à le rejoindre. Son fils faisait ses premiers pas seul, hésitant avant de retomber … Il rattrapa la balle que le garçonnet lui lançait et la poussa du pied vers lui. Son fils et lui jouaient et riaient ensemble sur un terrain de jeux. Un orage approchant, ils courraient pour rattraper la balle. Une fillette arachnienne la leur tendait avec un sourire édenté avant de lui faire une révérence … Une lettre était arrivée chez eux tandis que Horus et lui jouaient. Sa femme était assise sur sa chaise favorite. Le Stratéguerre avait décidé d'étendre l'Empire que son père lui avait légué et tous les hommes étaient appelés à se rendre aux casernes pour rejoindre leur affectation. Son grade de sous-officier lui valait d'être envoyé sur une lointaine colonie pour y maintenir l'ordre … Sa femme et Horus lui manquaient. Quel âge avait-il donc ? 14 ou 15 ans ? Il avait dû beaucoup changer, en presque 10 ans ! Heureusement pour lui, Horos avait obtenu promotion sur promotion. Il était désormais le commandant d'une base scientifique sur Euphor. Îrùclæd l'avait rejoint et Horos travaillait maintenant sur les nouveaux modèles d'Antéraks. Il supervisait entre autres choses la fabrication d'un robot dont il connaissait fort bien les plans originaux, l'ironie ayant voulu que le Stratéguerre tombe sur les dessins de son projet d'étude avec Hérésia … Il leur avait ordonné de quitter Euphor. Horos se doutait que quelque chose d'important allait bientôt se passer mais il obéissait aveuglément, espérant toujours que le Stratéguerre l'autoriserait à rejoindre sa famille … Sa femme avait disparu et son fils lui avait écrit une lettre des plus incendiaires. Selon lui, elle aurait pu être sauvée s'il avait accepté de les rejoindre. Malheureusement, malgré son désir de la voir une dernière fois, il n'avait pas obtenu de permission. Son fils l'informait aussi de sa décision de s'engager. Horos espérait qu'il parviendrait au moins à se tenir éloigné des combats … Il le revoyait, faisant ses premiers pas d'une démarche hésitante … Il se retourna de nouveau en entendant son fils qui l'appelait et lui sourit.
« Qu'est-ce qui t'arrive, fils ! »
« Ataah ! On va voir maman ? »
« Maman ?! Mais elle est … »
« Occupée, oui, je sais, ataah ! Mais j'ai envie de la voir, moi ! Elle me manque ! ... Je lui ai fait un dessin, regarde, ataah ! »
Il regarda la feuille que tenait son garçon. C'était Stykadès vue de l'espace. Il sourit et prit le dessin à l'instant où la feuille prenait feu dans la main de l'enfant.
Horos se réveilla en sursaut et, voyant le soleil dans le ciel bleu, il réalisa instantanément qu'il avait rêvé. À côté de lui, Niji gémissait et s'agitait dans son sommeil.
« Niji ! Réveilles-toi, c'est un cauchemar, mon Arc-en-ciel ! Réveilles-toi, tu n'as rien à craindre ! Je suis là ! »
Il lui prit la main et, sans savoir pourquoi, il se retrouva à courir avec d'autres Végans vers les abris disséminés sur tout Stykadès tandis que les sirènes des alarmes résonnaient dans sa tête. Une porte se referma derrière lui et il vit avec horreur un des ses compagnons de fuite resté en arrière tomber et mourir sous les radiations. La chaleur le faisait étouffer. Il tenta d'appeler Îrùclæd à l'aide, ne comprenant pas se qui lui arrivait. Soudain, il réalisa qu'il tenait la main de quelqu'un et, regarda qui était avec lui. Reconnaissant Niji, il lui sourit. S'ils devaient mourir dans cet enfer, il était maintenant sûr qu'ils seraient ensemble jusqu'au bout. Une main se posa sur son épaule et le repoussa en arrière, loin de la femme qu'il aimait. Il frappa celui qui tentait de les séparer et qui tomba au sol, plié en deux. L'homme le saisit à la jambe et parla :
« Au nom de l'Arbre, réveilles-toi, cousin ! »
À ces mots, Horos lâcha la main de Niji et regarda l'homme à terre. Il reconnût Îrùclæd qui venait de le réveiller. En toussant, il lui demanda :
« Qu'est-ce que tu as ? Pourquoi tu es par terre, Îrùclæd ? »
Le garde tentait de respirer, une main posée sur son entrecuisse et l'autre sur le lit de Horos. Au bout que quelques secondes, il le regarda et, les larmes aux yeux, il parla en luttant toujours contre la douleur qui remontait jusqu'à sa gorge.
« Quand ce n'est pas elle, c'est toi qui me frappe ! Nom d'un chien, Horos, ça fait mal, tu sais ! Heureusement que j'avais mis ma coquille sinon, tu aurais dû te trouver quelqu'un d'autre pour veiller sur toi ! »
« Je ne t'ai pas frappé, non ? »
« Si !
– lui répondit son cousin en s'asseyant sur le matelas. – ... J'ai tenté de vous réveiller l'un et l'autre mais c'était impossible ... J'ai voulu entrer en contact mental avec toi, mais je me suis heurté à un mur, ... le sien !
– dit-il en désignant Niji que Zgrum-zgrums portait dans ses bras, enroulée dans un drap de bain. Une envie de tuer l'adolescent remonta le long de la colonne vertébrale de Horos. Îrùclæd suivit son regard et eût un léger sourire avant de continuer ses explications. – Après, j'ai essayé de te faire lâcher sa main et c'est là que tu m'as frappé ! »
Horos, qui n'avait pas quitté Zgrum-zgrums des yeux, écumait. Il lança :
« Pose-la ! Et ne la touche plus ! Je vais la réveiller ! C'est mon travail ! »
Îrùclæd fit signe à ÀçhùÎzaegrùms d'obéir en silence et le jeune garde reposa Niji sur le lit. Horos posa sa main sur celle de la jeune femme qui geignait, toujours prisonnière de son cauchemar. Elle était glacée. Pourtant, le front de Niji était couvert de sueur. De nouveau, Horos eût la sensation d'étouffer mais il ne parvenait plus à communiquer avec elle. Elle s'était refermée comme un coquillage pour les protéger.
« Il faut qu'on la réveille ! ... Îrùclæd, essayes ! Je n'y arrive pas ! »
« Je n'y arriverais pas mieux que toi ! »
« Alors, dégages ! Je vais réessayer jusqu'à ce que j'y arrive ! »
« Non, cousin, ÀçhùÎzaegrùms est le seul qui ne risque pas d'être enfermé avec elle ! Quand j'essaie, je vois des choses horribles et je sais que c'est pareil pour toi ! Lui, il ne voit pas ce qu'elle rêve ! Il pourra la sortir de là ! Au nom de l'Arbre, laisse-le faire ! »
Horos se tourna vers l'adolescent et sèchement, lui ordonna :
« Réveille-la ! Et vite ! »
« Je vais essayer un truc que ma maman faisait quand j'avais des cauchemars, Général ! ... Mais pour ça, je vais devoir la prendre dans mes bras et la transporter ... Alors ne me grondez pas, d'accord ? »
« Fais-le ! Je ne te dirais rien si tu arrives à la sortir de là ! »
Horos s'effondra sur le matelas, haletant, tandis que le jeune soldat soulevait Niji et l'emportait à la salle de bains. Il posa la jeune femme toujours enveloppée du drap de bain sur le siège de la baignoire et régla la température de l'eau. Il l'aspergea, en commençant par les jambes. Soudain, Niji se réveilla en sursaut et hurla en voyant que ÀçhùÎzaegrùms lui mouillait la poitrine. Elle saisit la serviette qui avait glissé sous la pression de l'eau et s'enroula dedans avant de sortir de la salle de bains, laissant l'empreinte de ses pas sur le sol. Heureusement pour lui, l'adolescent ne l'avait pas regardé à une seule reprise depuis qu'il l'avait assise. En réalisant où elle débouchait et que Îrùclæd était là, elle rougit et se précipita vers Horos. Les deux gardes sortirent rapidement. Il l'attira à lui et posa ses mains sur le visage de la jeune femme.
« Tu vas bien ? Nous n'arrivions pas à te réveiller ! »
« Oui, ça va, maintenant ! Mais c'était horrible ! J'en ai assez de faire le même cauchemar toutes les nuits, Horos ! ... Quand c'est pas plusieurs fois dans la même nuit ! C'est quoi, cet endroit ? Tu étais dans mon cauchemar, cette fois ! C'était la première fois ! D'habitude, je suis seule et j'essaye de survivre mais ça finit toujours pareil ! Si je ne rejoins pas les abris, je meurs en ayant l'impression d'étouffer et de brûler de l'intérieur et si j'y arrive, ce sont les séismes qui me tuent ... Quoi que je fasse, je n'arrive pas à survivre ! J'ai à chaque fois l'impression que c'est la fin du monde ! »
Horos la regarda, horrifié de découvrir qu'elle faisait ce cauchemar de façon répétitive.
« De ... Depuis combien de temps, tu ... es dérangée par ces images ... Dis-moi, Niji ? »
« Depuis la nuit d'après la Saint Valentin ! La seule fois où j'y ai échappé, c'est quand tu as dormi dans ma cabine, sur la Base ! »
Horos l'enlaça avant de la bercer. Il l'embrassa à nouveau.
« Les évènements sont toujours les mêmes ? Ou est-ce qu'il y a des différences, certaines nuits ? »
« Oui, cette fois, tu étais là avec moi ! Et tu me tenais la main jusqu'à ce qu'Îrùclæd ... »
« ... Nous sépare et que je le frappe, je sais ! C'est parce que je te tenais effectivement la main que tu m'as intégré dans ton cauchemar. D'autres changements ? »
« Non, c'est toujours exactement la même chose ! ... Horos, j'ai peur ! J'ai l'impression que c'est réel ! Tu sais où on était ? »
Tout en parlant, Niji s'était blottie contre le Végan. Il la regarda, soudain glacial.
« Oui, je connais ces lieux. Cette planète, c'est Stykadès ! Et ton cauchemar n'en était pas un ! Tu aurais dû me le dire plus tôt ! On rentre sur la Base, ce soir ! Je dormirais dans ta chambre ! Si tu as de nouveau cette vision là, je veux que tu me réveilles pour m'en parler ! »
« D'accord, Horos ! ... Horos, le petit garçon, c'était ton fils ? »
« Quel petit garçon, Niji ? »
– demanda l'homme de Véga.
« Avant mon cauchemar, j'ai rêvé que tu jouais à la balle avec un petit garçon et qu'il y avait un orage qui arrivait ! »
– répondit Niji avant se mordre la lèvre.
« Tu étais dans mon rêve ? ... Je ne t'ai pas vue ! »
« Comment ça, tu ne m'as pas vue !? C'est moi qui ai rattrapé le ballon et qui te l'ai rendu ! »
« ... Toi !? Mais tu avais l'air d'une fillette arachnienne. Tu m'as même ... »
– dit Horos en l'enlaçant de nouveau.
« Fais une révérence et un grand sourire !
– Elle s'écarta de lui et renouvela son geste – C'est ce que me disait Obaasan, quand j'étais petite : 'Face à ton Roi, fais une révérence et un grand sourire' ! »
« 'Face à ton Roi …' ?! Tu connais cette maxime ?!
– s'étonna Horos – Mais je te signale que je ne suis que Prince Héritier, pas Roi ! ...
– Il lui sourit et l'embrassa avant d'ajouter – Et toi, tu n'avais pas le joli sourire que tu as aujourd'hui ! Il te manquait deux dents de devant, ... celles du haut !! »
« Je devais avoir 5 ou 6 ans, alors ! C'est un âge où les enfants terriens perdent leurs dents ! ... Et c'est pas important, que tu sois seulement 'Prince Héritier', moi, j'ai toujours pensé que c'est le même travail que 'Roi' ! ... Alors, c'était ton fils, oui ou non !? »
Le visage d'Horos s'assombrit un instant. Pourquoi avait-il fallu qu'il rêve de lui ?
« Oui, c'était mon fils aîné, Aël. Il est mort quelques semaines plus tard ! »
« Il était mignon ! Comme son père ! »
Niji sourit. Horos la serra dans ses bras, déposa un baiser sur ses lèvres et sourit à son tour.
« Tu es gentille … Je t’aime, Niji !
– Horos regarda l’heure au poignet de la jeune femme et lui dit – Tu devrais t’habiller, on va bientôt partir ! »
« D’accord ! Tu peux me passer ma robe, s’il te plaît … »