Les premiers animefans français, souvenirs et témoignages

[Super Shogun]

J'aime bien cette bio sucrée de tous ces gens... Quand on sait que c'était tous des connards imbus d'eux-mêmes et versant dans le "'j'impose ce que j'aime et je bloque le reste", c'est fruité.

[Monsieur Vilak]

Merci pour le lien.

Ici à Nîmes je n'ai pas de mauvais souvenir de tous ceux que j'ai eu en face moi derrière un comptoir.

[Super Shogun]

Faudra un jour que je parle de Tonkam Monge, parce qu'il y avait deux boutiques Tonkam à Paris à une époque...

[Monsieur Vilak]

Mais faites Monseigneur...

[Super Shogun]

Mais faites Monseigneur...

Que dire ? J’ai dû y aller trois fois. Monge fut ouvert pendant la grande période Tonkam, vers 95/96 je pense, quand ils avaient autant de monde sur le trottoir de leur boutique de Bastille que dedans... C'était un spectacle, croyez-moi ! On avait là les premiers otakus français. Des imbéciles prononçant compulsivement les quelques mots de jap qu'ils connaissaient et tous formés au Club Dorothée. Ils se découvraient depuis 6 mois une « passion » dévorante pour les mangas, surtout en VF, et venaient dépenser l'argent de papa/maman dans des goodies à la con sur DBZ ou Sailor Moon.

C’est grâce à ces passifs ne sachant qu’acheter, que le chiffre d'affaire de Tonkam explosa. Plusieurs dizaines de millions de francs. Ils étaient là au bon moment et cela leur permit de se diversifier. Après les manga, ils visèrent une autre niche: la musique japonaise. Attention, je ne parle pas de musique d'anime, mais bel et bien de Jpop. Des artistes japonais, chanteurs, chanteuses, groupes, rock, pop etc. C'était intéressant, surtout pour des gens comme moi qui s'y intéressaient depuis déjà quelques années grâce à leurs correspondant(e)s japonai(se)s. Internet n’était pas encore dans tous les foyers.

On devait être en 1997 et j’étais curieux. M’y rendant, j'entrais dans une immense boutique. La surface commerciale était largement le double de celle de Bastille. Problème, il n'y avait rien dedans ! Pleine de vide ! Et les quelques bacs de Cd ne comportaient que du « rock visuel », qui est du heavy FM à perruque. Les noms des artistes se comptaient sur une main de lépreux : 90% du X Japan, un peu de Luna Sea, de Malice Mizer et aussi beaucoup de musique indienne et autres machins des moines tibétains pour tomber en transe... Faut savoir que Veyret était dans ce trip d'illuminé à l'époque. C’est ça la musique asiatique qu’ils proposaient ? Nous étions dans la seconde moitié des années 90, et à l’Oricon, nous avions une profusion d'artistes nouveaux (merci la bulle Internet!) : Puffy, Kiroro, Go ! Go ! 7188, My Little Lover, The Brilliant Green, Speed, Spitz, toutes les productions de Tetsuya Komuro, les Morning Musume venaient d’être créées etc. Pas un seul de ces Cd n'était dans les bacs de Tonkam Monge ! Où est le choix ?

Me dirigeant vers le seul vendeur de la boutique, je lui demandais où étaient tous les artistes N°1 du moment et pourquoi il n'y avait que du X Japan à la con dans leurs bacs, groupe déjà ringard à ce moment-là, même s'il allait revenir un peu à la mode l'année suivante du fait du décès du guitariste dans des conditions presque comiques... Et là, il me sort texto:

- On ne vend que ça de parce que y’a que X Japan de bien dans la musique japonaise !

Je n'ai jamais oublié cette phrase ! C’était désormais clair. Tonkam imposait ses goûts et se fabriquait ainsi une clientèle en leur faisant connaître qu’un truc ou deux grand maxi (économies d’importation) afin de le leur refourguer ensuite les Cd à 350 francs pièce et autres posters. Et ça marchait super bien, surtout chez les nanas ! Je me souviens d’un défilé de goth-poufs avant l’heure à BD Expo 98, avec Greg de Joypad jouant les MC pour un concours de cosplay je crois, et à chaque fois, il leur demandait ce qu’elles aimaient comme musique japonaise : « X Japan ! » revenait tout le temps ! A force de taper sur un clou, il finit par rentrer…

Monge n’a pas duré bien longtemps et a fermé bien avant Tonkam Bastille. Une énorme perte… Le micro déclic Jpop en France viendra plus tard, grâce au Net.

[Monsieur Vilak]

Merci!
Ta verve habituelle est appréciée!
Le décès du guitariste? Ah dis nous en plus s'il te plait!

-----
-----

Donc si je te suis bien, les gros flux de pognon pour ces boutiques, c'était après la sortie massive de mangas en VF**? Ca n'a pas débuté juste après la publication par le club Do de l'adresse de Junku fin 1989?

**Liste en construction des mangas publiés en VF ici :
http://www.goldorakgo.com/forums/viewto ... f=4&t=6579

-----
-----

Autre question, c'est la publication massive de mangas en VF et la a multiplication des éditions vidéo qui a tué ces petites boutiques au début des années 2000 ou autre chose?

[Super Shogun]

Le décès du guitariste? Ah dis nous en plus s'il te plait!

https://fr.wikipedia.org/wiki/Hide

Donc si je te suis bien, les gros flux de pognon pour ces boutiques, c'était après la sortie massive de mangas en VF**? Ca n'a pas débuté juste après la publication par le club Do de l'adresse de Junku fin 1989?

En gros oui. Jusqu'en 1994, personne de "blanc" n'allait à Junku, d'ailleurs personne en connaissait cette librairie sauf les japonais résidants à Paris. Et Tonkam était surtout une librairie donnant dans le comics ricain. La mode est venue avec DBZ dans le Club Dorothée, qui faisait un audimat de dingue, puis par Glénat qui a commencé à publier la VF du manga. En 94/95, les magazines de jeux vidéo comme Joypad ou Player One ont parlé de Junku, des manga, puis les premières VHS sont sorties, avec pas mal de titres différents (Ken, Ranma, Dominion, Gunnm, Urotsukidôji...) et ça a fait boule de neige avec en plus la nostalgie des anciens dessins-animés jap comme Goldorak. D'ailleurs, c'est à peu près là que les émissions "Génération Albator" sont venues à la télé. Quand France 3 a vu l'audimat de fou de la première émission en 98, alors que c'était tard, ils ont pas compris...

Autre question, c'est la publication massive de mangas en VF et la a multiplication des éditions vidéo qui a tué ces petites boutiques au début des années 2000 ou autre chose?

Ça je ne sais pas vu que je n'y allais plus depuis des années, j'ai pas assisté à leur mort. Il y a peut-être eu surproduction oui mais je pense surtout que, dès que les supermarché du loisir façon Fnac se sont lancés dans la vente, c'était cuit pour les petites structures.

[Monsieur Vilak]

Donc si je te suis bien, les gros flux de pognon pour ces boutiques, c'était après la sortie massive de mangas en VF**? Ca n'a pas débuté juste après la publication par le club Do de l'adresse de Junku fin 1989?

En gros oui. Jusqu'en 1994, personne de "blanc" n'allait à Junku, d'ailleurs personne en connaissait cette librairie sauf les japonais résidants à Paris.

LVD dit que fin 89, dès la publication de l'adresse de Junku dans le Club Do mag :
"Junku a du connaitre une faramineuse explosion de son chiffre d'affaires dans les semaines qui ont suivi... "
Ok, il ne fait que supposer, mais ce serait quand même évident non?

[Super Shogun]

Je ne pense pas que Junku a vu débarquer des tas de gens dans leur librairie pour leur demander du DBZ en 1989, surtout qu'à cette époque, Dorothée diffusait la série alors que Gokû était encore un enfant. Le succès est venu avec DBZ et de la baston à n'en plus finir et ça, ça a démarré plus tard.

[Monsieur Vilak]

Je vois, donc 91 l'époque du premier Animeland c'est encore très très underground?

---
---

Seb, si comme tu dis le manga "Vidéo Girl Aï" est de la romance pour puceau, alors le mec de Tonkam qui l'a édité devait avoir une bien piètre opinion de sa clientèle.

---
---

Montreuil si je crois ici :

https://www.memoireonline.com/01/08/858 ... ltes5.html

Je ne t'ai pas remercié pour le lien.
Alors voilà : Merci!
Je l'ai mis en première page, comme le développement de Seb sur la boutique Monge.

[Super Shogun]

Je vois, donc 91 l'époque du premier Animeland c'est encore très très underground?

Il y avait déjà des fans mais bon, tu les faisais tous tenir dans une cantine scolaire... Un micro milieu.

Seb, si comme tu dis le manga "Vidéo Girl Aï" est de la romance pour puceau, alors le mec de Tonkam qui l'a édité devait avoir une bien piètre opinion de sa clientèle.

Ou très réaliste.
Mon avis sur VGA est très personnel. J'ai pourtant acheté toute la collec VF à l'époque, y'en avait 15 ou 16 en tout je crois, pas tous de la même taille en plus ce qui donnait un aspect assez biscornu dans la biblio... Honnêtement, le travail de traduction et d'adaptation était bon. C'était un des tous premiers manga traduit avec un soucis de qualité. On ne peut pas dire que Glénat faisait de même. La première VF de Ranma, arghh...

[Monsieur Vilak]

Moi aussi, j'ai pris tout VGA même si ça me semblait bien pathos.
Jary a adoré tu disais?


Je trouvais incroyable de voir une histoire inconnue publiée et je me demande encore comme ils l'ont choisie.
Et je me demandais où étaient les Goldorak et Albator que nous attendrions encore longtemps.

[Super Shogun]

Personne ne connaissait Katsura en France à ce moment-là, ça a peut-être joué pour les droits, je ne sais pas.

[Monsieur Vilak]

Ah oui l'histoire de la licence pas chère, comme pour les premières VHS de Animeland.

[LVD]

>Jusqu'en 1994, personne de "blanc" n'allait à Junku, d'ailleurs personne en connaissait cette librairie sauf les japonais résidants à Paris.

Objection! Mais je pense qu'il y a confusion entre deux periodes.
Il y a effectivement eu un enorme boom suite au succes de DBZ quelque part autour de 94. Mais ca, c'etait deja une deuxieme vague, certes plus importante, la premiere remonte a en gros 91. En 92-93 tous les animefans de mon entourage connaissaient deja le Weekly Jump et les manga relies et en avaient parfois deja achete (a Junku ou Tokyo-do, y avait peu de possibilites sinon), ainsi que des CD d'OST (des vrais! les CD pirates arriveront un peu plus tard). Y avait aussi deja pas mal de fanzines.
Premier numero:
Mangazone 90
Animeland 91
Sumi Jooho 91
Tsunami 92
Namida 93
Effet Ripobe 93
Manken Z 93
Chibi Setsumei 93
Seiganmag 93
Bref, en 93 le fandom etait deja bien installe!!

Junku etait un peu la mecque des fans (et pour cause, c'etait quasiment le seul endroit a en vendre!), jusqu'a ce que Tonkam ne se mette a faire du manga en gros volume. Je ne me rappelle plus exactement mais la seule fois ou j'ai mis les pieds a Paris pour aller a Junku ca devait etre en 94, et ils avaient deja demenage (leur premiere adresse etait devenue bien trop exigue pour accueillir tous les fans de manga; et comme une boutique ne demenage pas en quelques jours, c'est que le boom avait deja eu lieu).



>- On ne vend que ça de parce que y’a que X Japan de bien dans la musique japonaise !

Putain, qu'est-ce que ca me fait mal d'entendre ca
Mais je suis d'accord avec mon camarade Super Shogun sur le fait que dans certains magasins, les vendeurs ne proposaient que ce qu'ils aimaient (le pire etant une boutique ou le proprio se rachetait lui-meme ses stocks )