SPECIAL ITALIE, l'autre grand pays de Goldrake !

Sujets concernant la serie d'origine (la vraie de vraie ...)
Biniou
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Re: SPECIAL ITALIE, l'autre grand pays de Goldrake !

Message par Biniou »

En remerciant mille fois Go-goldorak (j'espère qu'il reviendra et je lui souhaite une bonne préparation de Bac :wink: ), voici la suite de la traduction des pages du bouquin :

(Page 249)
Antagonistes et subordonnés.
Les forces de Véga qui cherchent à conquérir la Terre sont organisées de façon hiérarchique. C’est typique des BD et des D.A. d’aventures américains ou japonais : Dans Goldorak, les relations entre les hauts gradés et les simples soldats sont froides et déshumanisées. Les soldats sont de la chair à canon et dépeints comme étant privés d’individualité, à l’exception de quelques responsables qui acquièrent pendant la série une importance pour des raisons narratives.

L’agressivité des généraux avec leurs soldats et celle du roi Véga – autorité suprême – avec ses larbins indique de façon simple la sévérité des valeurs des ennemis dans la série. Ainsi, malgré leurs quelques divergences sur la façon de faire la guerre, les ennemis sont systématiquement dépourvus par les auteurs de sentiments positifs, ceci afin d’encourager les jeunes téléspectateurs à les mépriser – ce qui est honnête, si l’on considère que de telles valeurs sont le désir de gagner à n’importe quel prix et le règne de la loi du plus fort en dépit des droits et de la souveraineté territoriale des humains – et de les stéréotyper en tant qu’ennemi incompréhensible dans d’un méli-mélo confus.

Protagonistes et antagonistes.

C’est typique dans ces fictions où les héros doivent faire face à un ennemi extraterrestre : Dans Goldorak, nous avons une petite équipe – dont les membres sont unis par des liens affectifs qui sont, en fin de compte, hiérarchiques à un niveau informel ou familial – contrainte de combattre un groupe organisé de façon formelle, supérieur en nombres et apparemment dépourvu de sentiments.
Alors que c’est la camaraderie qui unit les héros, les antagonistes ont des relations entre eux dictées par les codes militaires et leurs antipathies réciproques. Les sentiments entre gentils et méchants dans cette série, comme dans beaucoup d’autres animés de la même période, sont assymétriques :

- Les gentils, après leur consternation du début suite à l’agression aveugle de Véga et les sentiments négatifs produits par l’invasion, accepte comme inéluctable le fait de devoir se battre pour survivre et, à l’exception de quelques insultes à l’encontre des ennemis, tentent de se focaliser davantage sur les sentiments positifs qui naissent de leurs relations au sein de l’équipe.

- Les méchants, au lieu de ça, si l’on exclut l’adoration du roi Véga et l’adhésion à la cause qui consiste à conquérir la Terre, n'ont pas de véritables sentiments les unissant et leurs émotions (négatives) sont toutes tournées vers l’extérieur, dans un processus d’auto-destruction. Parmi les quelques exceptions à cette règle, voulues par les scénaristes pour éviter de dépeindre les ennemis d’une façon excessivement sévère, il y a par exemple l’amour paternel du général Horos pour son fils et celui de Véga envers sa fille.

Page 250 à suivre.

A MEDITER !!!!!! :D :salut:
Modifié en dernier par Biniou le sam. mars 25, 2017 12:32 pm, modifié 1 fois.
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Goldorette
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Re: SPECIAL ITALIE, l'autre grand pays de Goldrake !

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Merci!
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Gurendaizä
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Re: SPECIAL ITALIE, l'autre grand pays de Goldrake !

Message par Gurendaizä »

merci beaucoup Biniou et Go-goldorak ! :up: :up: :up: :up: :goldo3:
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Message par Biniou »

La suite :D
(Page 250)
Décors.

Comme beaucoup d’animés pour enfants, japonais ou non, Goldorak tend à simplifier beaucoup le monde suggéré en arrière-plan de l’intrigue, mais en dépit de ça, les décors indiquent que la guerre qui fait rage entre terriens et forces de Véga est très locale :
Elle se déroule au Japon, précisément sur l’île de Honshu, où l’on retrouve Tokyo, le Mont Fuji et, dans l’animé, le ranch où travaille Actarus/Duke Fleed (prince d’Euphor), non loin du Centre de recherches astronomiques du Pr Procyon.

La ferme Shirakaba (traduite par ranch du bouleau blanc en Italie – ndt : et en France), près de laquelle se trouve le Centre qui sert de base secrète pour Goldorak, est située à 100km à l’ouest de Tokyo dans une forêt de bouleaux qui correspond en réalité à la préfecture de Yamanashi, dont les paysages sont très bien reproduits dans l’animé (Villella 2005).

Depuis que les forces de Véga savent que pour pouvoir conquérir la Terre, ils doivent se débarrasser et, mieux encore, mettre la main sur le puissant Goldorak, ils concentrent leurs efforts sur l’endroit supposé de son repaire.

Dans Goldorak, l’absence d’un « système monde » plus complexe incluant d’autres pays, gouvernements et armées, trouve sa justification narrative officielle dans le degré extrême d’évolution scientifique des ennemis : Peuvent seulement les combattre Goldorak et ses alliés japonais. La raison plus profonde d’ordre narratif est que la série, comme dit plus haut, a pour fondement un groupe mixte à fonctionnement familial – qui regroupe terriens et gens d’Euphor – combattant pour sa propre survie un ennemi militairement organisé et « vide ».

Comme cela se passe dans bien d’autres narrations de tous pays, dans cet animé nous avons un groupe compact, dont les membres sont unis par les liens du sang ou/et affectifs, sur un territoire considéré par tous comme étant la terre d’accueil chère à son cœur (Heimat), s’opposant à un envahisseur qui ne tient aucunement compte de l’aspect sacré du sol qu’il attaque. Et il se trouve que Honshu est le lieu où le mythique noyau de Yamato, là où l’on pense qu’a débuté la dynastie impériale au 3ème siècle, a existé durant des millénaires.

NB Apport du traducteur : noyau mystique vierge de toute contamination étrangère. Voir aussi : https://fr.wikipedia.org/wiki/Enqu%C3%A ... omme_noyau" onclick="window.open(this.href);return false;

La représentation cyclique des mêmes lieux, d’épisode en épisode - certainement due aussi à un besoin de faire des économies sur les décors de fond et sur les séquences – a pour effet de projeter le téléspectateur dans des lieux qui, après quelques épisodes, ne sont plus étrangers mais familiers comme s’il s’agissait d’une maison virtuelle et grâce à la topographie schématique de ces lieux, les enfants se les rappellent facilement.

A suivre : page 251

Intéressant tout ça, non ?! :up:
Biniou
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(Page 251)

VI.2.4.2 Les générations, la guerre et le portrait des ennemis

Générations et néo-confuscianisme.
Cet élément n’est pas injecté en profondeur dans Goldorak, en comparaison de ce qui se passera, des années plus tard, dans d’autres animés de science-fiction d’auteurs comme Yoshiyuki Tomino, inventeur de la saga Gundam. Mais il y est néanmoins présent, dans la relation entre les 2 générations qui combattent Véga : les jeunes (Actarus, Alcor, Vénusia et Phénicia) et la représentation de l’adulte incarné par le Pr Procyon.

En dépit du fait que l’impétuosité d’Alcor à vouloir prendre part au combat contre les envahisseurs et que la réticence d’Actarus à utiliser GOLDORAK en raison de sa nature pacifique contrastent par moments avec les directives du Pr Procyon, les décisions du scientifique sont toujours très sérieuses, avisées et jamais vraiment discutées par les deux garçons.

Une situation semblable peut aussi se trouver dans les 2 autres séries de la Mazin Saga que sont Getter Robo et Getter Robo G : c’est seulement à partir de Kôtetsu Jeeg que Nagai et ses collaborateurs ont commencé à inclure le thème narratif de la protestation d’ordre générationnel de Hiroshi contre la volonté de son père, qui l’a laissé dans une situation à laquelle il est impossible d’échapper (…). Dans tous les cas Hiroshi exécutera la volonté de son père en reconnaissant sa sagesse.

Dans toutes ces séries, les figures de l’adulte dirigeant la stratégie de combat contre l’ennemi, dépositaires du savoir, sont soit des pères biologiques, soit des pères adoptifs, et toujours des figures paternelles. Le message implicite est que seule la sagesse qui vient avec l’âge forme le jugement.

Le fossé intergénérationnel n’existe pas : l’aspect cyclique de l’âge dans ces animés est vu comme un fait, une continuité naturelle. Les plus âgés ont le droit de prendre les décisions tandis que les jeunes plus vigoureux doivent combattre. En dépit d’une période de troubles politiques et des mouvements de la jeunesse qui ont connu leur apogée en 1970, la société ne connaît pas de fracture dans les animés de Nagai, justement parce que les auteurs et producteurs voulaient éviter de tourmenter les jeunes du public cible.

A suivre : Page 252.
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Gurendaizä
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:wink: :up: :goldo3:
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(Pages 252 et 253 partielle)

La guerre et l'uniformisation de l’ennemi.

Les exégètes d’animés les plus enthousiastes ont souvent vu des enseignements moraux importants dans ces séries, ce qui est évident dans le fait insistant que la violence est le dernier recours et doit être utilisée uniquement dans le but de survivre, que la vie reste la valeur suprême, que l’auto-défense est juste quand il devient clair qu’aucune autre solution n’existe face à un adversaire qui va délibérément éviter la confrontation à l’amiable.

Ces indications expriment même une certaine cohérence et, dans beaucoup de produits, même un pouvoir pédagogique. Ceci se trouve seulement à un niveau superficiel mais, je le répète, ce niveau de communication est le plus important parce qu’il peut être aisément reçu par tous types de téléspectateurs, en particulier le public cible que sont les enfants et les ados.

Cependant, d’autres thèmes émergent, je crois, face à un examen plus désenchanté et ils ont déjà été partiellement illustrés au chapitre III.2. Pour les résumer rapidement, il suffit de dire que dans une série comme Goldorak, le contraste créé par les parties en jeu est plutôt manichéen. Les leaders ennemis combattus par les héros sont annonciateurs d'un mal absolu. Ce qu’il faut établir ici c’est la manière avec laquelle sont dépeints les officiers envahisseurs et leurs subordonnés. Aucun soldat n’est dépeint comme ayant une opinion ou des sentiments au regard du conflit. Inversement, l’entêtement des dirigeants et leur haine exacerbée contre les terriens et Goldorak sont si radicaux qu’ils en deviennent des fous suicidaires.

Deux mécanismes symboliques entrent en jeu ici. Le premier est plutôt brutal mais fonctionne bien : Les téléspectateurs européens comme japonnais peuvent voir la référence directe et évidente aux despotes fascho-nazis dans le salut romain et le claquement des talons que pratiquent les hauts gradés Minos, Horos et Hydargos. Les concepts épousés par Véga et son loyal Minos, comme « La paix n’existe pas, c’est juste un intervalle entre 2 guerres » ; « Qui perd n’a pas le droit à la parole », « La raison appartient au plus fort, seuls les faibles succombent », sont l’expression d’un darwinisme social obtus – à l’échelle galactique étant donnée la nature du conflit – dont le but véritable est de déplacer le mal par-delà les frontières nationales comme déjà expliqué au chapitre III.2.2.2.6.

Le second mécanisme, le nivellement moral de l’ennemi, est un moyen qui a toujours été utilisé dans la propagande guerrière pour représenter l’ennemi : il est plus facile de combattre un ennemi sans visage ni âme. Ce mécanisme psychologique utilisé dans les scénarii de guerre est aussi étudié dans des situations courantes de dialectiques ou conflits entre groupes sociaux. Le fait que ce moyen ait été utilisé dans Goldorak pour des besoins de simplification narrative ne doit toutefois pas faire penser à une intention délibérée de déshumaniser l’ennemi pour acquitter les héros.

Dans les séries de Nagai, dont le niveau basique de réalisation évoque celui des jeux vidéo de combat, l’individualisation d’un ennemi a pour fonction de débuter une série d’évènements qui visent à mettre en valeur la forme et la puissance d’un robot, qui est avant tout un jouet en vente dans les magasins.

A suivre p. 253 fin et suivantes.
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Gurendaizä
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merci ! :up: :goldo3:
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Pages 253 et 254

Mais entre les lignes de cette architecture narrative, il est aussi possible de distinguer dans l'ombre 3 autres significations intégrées par Nagai et les autres auteurs. Deux d’entre elles ont déjà été mentionnées.
La première concerne la mémoire, encore non historiquement résolue, du violent passé impérialiste du Japon. Dans l’animé, il est « exorcisé » par le fait de donner au pays le rôle de cible d’une invasion par des agresseurs sanguinaires : En inversant ainsi les parties, il est possible d’obtenir un certain degré d’absolution symbolique, bien que limitée à la fiction télévisée pour enfants. Si une telle hypothèse était au moins partiellement valide, elle révèlerait une ambiguité idéologique, bien que probablement non intentionnelle et non reliée aux possibilités interprétatives des jeunes téléspectateurs de l’Ouest qui, lorsque les animés « à robot » leur sont arrivés, n’avaient pas le moindre indice des possibles symboles dissimulés dans ces produits innovants en provenance d’une culture lointaine et presque totalement méconnue.

La seconde signification tient dans la l’approche métaphorique - analysée par de nombreux auteurs et déjà discutée ici au chapitre III.2 – de l’envahisseur attaquant le sol japonais avec des armes mystérieuses. Cependant, dans l’animé, le Japon sait réagir car il possède lui aussi une technologie de pointe.

La 3ème signification est certainement la plus intéressante parce qu’elle pourrait bien résoudre des énigmes. Mais puisque que cette hypothèse interprétative est connectée au dernier niveau de signification mentionné au début du paragraphe VI.2.4 et discuté dans le second point du paragraphe qui suit, je l’illustre ici. Pour l’anticiper on peut dire qu’elle implique le positionnement politique du Japon dans la seconde période d’après-guerre.

VI.2.4.3. Les messages en filigrane relatifs à l’identité politique du Japon.

Goldorak révèle qu’il est possible de découvrir 2 métaphores cachées.

1)1ère métaphore : les peines du jeune Alcor, entre marketing et droits d’auteur.

Elle existe sur un plan narratif et concerne l’évolution des équilibres entre les personnages : en particulier, le processus de maturation du jeune Alcor, le personnage préféré des fans de Nagai, conformément à l’interprétation proposée par Montosi dans sa monographie sur Goldorak (2007) et mentionnée au paragraphe VI.2.1.
D’après cette clé de lecture, durant les 3 séries de la MazinSaga, Alcor, le jeune pilote de Mazinger Z d’abord, dans la série Mazinger Z, tient le rôle de protagoniste et de frère aîné du petit Shirô qui l’adule. Ensuite, dans Great Mazinger, il est un invité co-star seulement dans les épisodes finaux et le beau-frère ( ?) du protagoniste, l’orphelin Tetsuya Tsurugi, pilote de Great Mazinger, adopté et entraîné au combat par le propre père d’Alcor.
Enfin dans Goldorak, il tient le rôle de l’assistant et petit « frère » du prince d’Euphor, héros avec lequel il n’est pas lié par le sang mais qui fait office pour lui de modèle de sagesse et d’adresse.

Montosi note que cette évolution dans la façon dont est représenté Alcor peut être lue comme un message de Nagai – et des auteurs de Toei – aux jeunes téléspectateurs pour signifier qu’en grandissant, on cesse progressivement d’être le centre de l’attention et que l'on doit souvent accepter de tenir des rôles plus secondaires. Au cours des 3 séries, Alcor, devenu dans les années 70 le personnage préféré des jeunes japonais (enfants et ados) grâce au succès de Mazinger Z, expérimente un processus de maturation et passe le relais à d’autres personnages, invitant ses fans à accepter le fait de devoir grandir. (…)

A suivre : pages 255 et 256.
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Ah oui, très intéressant comme interprétation!
Mais les téléspectateurs français qui ne connaissent que Goldorak, n'en ont pas idée.
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Gurendaizä
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:up: :goldo3:
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Pages 255 et 256

D’une part, l’auteur japonais de cet animé a préféré faire varier les personnages acteurs pour une question (personnelle et d’auteur) de renouvellement narratif.
D’autre part, Tôei, société de profit, était moins ouverte à l’idée de laisser sur la touche un personnage tant chéri par les téléspectateurs et c’est pour cette raison aussi qu’Alcor fait son retour à la fin de Great Mazinger, en rejoignant le nouveau personnage Tetsuya, qui s’était un peu battu pour gagner une place dans le cœur du public davantage attaché à Alcor.

En fin de compte, dans Goldorak, l’assistant Alcor, pilote d’un vaisseau de renfort qui n’est pas le robot principal, est en effet le résultat d’un tel compromis atteint en 1975 par Tôei – qui voulait dans ce nouvel animé un point de force narratif, un personnage déjà ancien qui avait prouvé sa popularité chez le public – et Nagai qui voulait introduire un nouvel intervenant – un héros extraterrestre, mystérieux et plus fascinant que le combattant terrestre classique.

Mais le travail de Montosi nous propose une clé de lecture plus en phase avec celles qui, au chapitre III.2. de cet ouvrage, ont déjà été mises en exergue comme étant des symboles cachés derrière le robot et les combats entre terriens et envahisseurs, qu’ils soient autochtones ou extraterrestres.

2) Seconde métaphore : Japon, USA et la situation géopolitique d’après-guerre.

- 1ère piste de lecture : La MazinSaga comme transfiguration des étapes dans les relations entre Japon et USA.
Si l’on décide de continuer à utiliser la symbologie choisie pour donner un sens aux ennemis, dans la 1ère série, depuis l’ancienne civilisation grecque de l’île de Rhode (Bardos) et dans la seconde série, à la mythique Mycène, alors dans Mazinger Z et Great Mazinger, le Japon combat une allégorie de l’Occident. Le Japon - qui, en réalité, depuis déjà la période Meiji, devait négocier avec une puissance étrangère dotée d’une technologie inégalée, de tenues et valeurs « surnaturelles » - est attaqué dans le 2 premiers chapitres de la Saga par ce qu’il reste d’une glorieuse tradition culturelle.

Au départ, l’ennemi est supérieur mais avec le temps il est à égalité et à la fin, avec un certain patriotisme élémentaire et grossier, il subit la défaite. L’impact est brutal : la civilisation ennemie, décadente après avoir eu son heure de gloire, est devenue aberrante et à son tour une source d’horreurs : des monstres mutants et hybrides.

C’est seulement grâce à la capacité susmentionnée de mêler son propre savoir avec celui qui vient d’ailleurs (yûgo) et d’unir les valeurs autochtones à la science euro-américaine (wakon yôsai) que Mazinger Z et Great Mazinger parviennent à l’emporter. Ce thème est explicité ainsi : lorsqu’Alcor, symbole du Japon dans la MazinSaga, s’adresse au professeur Procyon et à Actarus pour suggérer que le Japon procède à des échanges commerciaux avec les extraterrestres, d’une façon semblable à celle opérée par le Japon dans la « période Edo, lorsqu’il signa un Traité avec l’Amiral Perry pour s’ouvrir au monde ». Ce qui fait que Vénusia l’appelle "nouveau Kaishû Katsu", en s'inspirant du célèbre officier de marine et homme d’Etat (1823-1899) convaincu de la nécessaire ouverture du pays sur les puissances de l’Ouest (Nagai – Ôta 1975 ; trad française 1998 :24).

Une partie de cette 1ère piste de lecture est aussi un point peu mis en exergue mais qu’il est possible de percevoir, en particulier dans Great Mazinger. C’est comme si sonnait dans cette série une alarme silencieuse, attirant l’attention sur le fait que, au milieu des années 70, le Japon est victime d’une crise d’identité du fait de ces nouveaux échanges culturels et économiques, continus et profitables, avec les USA. C’est une période d’incertitudes, caractérisée par un regard désenchanté à l’égard des alliés, depuis le retrait progressif de l’occupation américaine de l’après-guerre, depuis la première grande crise énergétique mondiale (1973) et depuis la sensibilisation à des thèmes tels que l’intégration interethnique et le racisme, ressentis au Japon bien plus que l’Occident ne le croit.

Un symbole de cette agitation est le personnage de Jun Hono, qui aide Great Mazinger en pilotant un robot d'apparence féminine, Venus Alpha. Initialement introduite dans le manga de Gosaku Ôta, Jun est une fille athlétique de mère japonaise et de père afro-américain (Guida 1999a :404) : si nous conservons l’approche métaphorique, elle est un exemple vivant de yûgô. Avec des traits typiques du métissage, une peau mate et une personnalité stéréotypée qui mêle le tact asiatique, l’audace américaine et la sensualité africaine, Jun est un personnage déchiré par sa condition qui fait d’elle un hybride, dans un pays qui n’aime traditionnellement pas le mélange interethnique.

A suivre : pages 257 et suiv.
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Dernière partie !

(Pages 257 à 259)

Une confirmation au plan figuratif provient de la comparaison stylistique de 3 types de personnages qui, à mon avis, représentent plutôt clairement une tripartition entre héros complètement japonais, héros qui incarne ou suggère un extraterrestre méritant respect et amitié, et personnages syncrétiques qui viennent en appui des autres, dont les racines morales viennent du Japon mais dont l’apparence physique puise dans les modèles esthétiques occidentaux.

Alcor représente parfaitement le 1er type de personnage : il incarne le Japon jeune et vigoureux, avec des traits somatiques qui rappellent sans aucun doute la physionomie typique du Japon dans l’animé (cf supra paragraphes II.6.1 et II.6.2).

Actarus, dont les tenues civiles sont un clin d’oeil aux hippies américains des années 70, dont la chevelure diffère beaucoup de celle du japonais de cet âge, dont la forme de visage et surtout la couleur de peau diffèrent légèrement de celles d’Alcor, représente clairement un non-japonais : cela devient évident au niveau narratif puisqu’il est un extraterrestre.
Plus intéressant serait de vérifier si ses traits somatiques et son teint de peau correspondent à l’hypothèse selon laquelle, dans Goldorak, les gens d’Euphor représentent une métaphore du citoyen américain (voir aussi supra paragraphes VI.2.4 ff).

Les personnages "de soutien", tels que le Pr Procyon et Riguel, représentent différentes façon de voir un mode graphique syncrétique. Riguel s’habille comme un cow-boy des plaines américaines, ce qui révèle son admiration pour un mythe qui a commencé à prendre racine au Japon à partir des années 50. Et alors il a des traits burlesques que Nagai a déjà utilisés dans d’autres de ses travaux - Harenchi gakuen, Cutey Honey – qui dérivent partiellement de la tradition japonaise du grotesque.

Procyon, d’un autre côté, ressemble plus à Actarus et ses tenues alternent entre la représentation typique d’un propriétaire texan et celle du scientifique en blouse blanche, mais son comportement reste guidé par l’éthique et les manières du Japon afin de communiquer au public que le guide «parent et stratège» dont les héros dépendent peut bien admirer l’habillement du gaijin (étranger), il n’en reste pas moins que son autorité et ses décisions puisent dans l’esprit du Japon.

En conclusion, derrière des aventures hautes en couleur, Goldorak communique comme message que le Japon a dépassé ses conflits internes et a accepté ses prérogatives. Il peut se permettre de jouer avec des clichés de la culture américaine (western, Gary Cooper, King Kong) et européenne (par exemple symbologie suggérée par les noms des personnages). Le Japon est à présent sûr de son identité, dans une relation d’égal à égal avec une puissance alliée maintenant transfigurée, comme déjà mentionné, dans le rôle dévolu à Actarus et à son puissant robot extraterrestre.

Le message qui cristallise sous la surface narrative est la croissance du Japon en tant que leader de l’Asie et superpuissance mondiale, finalement libérée de son complexe d’infériorité désormais caduque, ce qui a par ailleurs été confirmé par différents chercheurs, dans des termes plus généraux (Morris – Suzuki 1998).

Seconde piste de lecture : La MazinSaga comme vision de l’histoire politique du Japon durant la période d’après-guerre.

Je crois par-dessus tout possible de voir dans Goldorak, à travers la métaphore du totalitarisme, une version élémentaire de la philosophie présumée de l’histoire du Japon contemporain des années 70. Il est établi que dans Mazinger Z et Great Mazinger, l’ennemi peut être vu comme une allégorie négative des puissances de l’Ouest, en référence à une période où le Japon était encore opposé aux forces de libération alliées.
Dans Goldorak par contre, 2 clans extraterrestres sont présents, gens de Véga et gens d’Euphor, et le Japon est pris entre les 2 en tant qu’allié d’Euphor. Si Goldorak, ami de la Terre, représente métaphoriquement les USA dans une période d’apaisement des tensions, - depuis l’armistice de 1945 les USA sont le protecteur inconditionnel du Japon – on se demande qui les forces de Véga peuvent bien représenter.

D’une certaine façon, la réponse à cette question est fournie par la dernière phrase du passage de William Gibson (fin du paragraphe VI.2.2). L’écrivain anglais a dit que les USA, après avoir contribué à la modernisation démocratique du Japon après la 2ème guerre mondiale, ont renvoyé les troupes d’occupation en 1952 sur d’autres fronts ou dans le cadre d'une stratégie en lien avec la guerre froide contre la coalition communiste. En tenant compte des hauts et des bas dans les idées de gauche du Japon et étant donnés les évènements qui se sont produits dans les relations entre Japon et pays communistes et socialistes de l’aire asiatique dans la période d’après-guerre, je pense possible de formuler une hypothèse.

Pas besoin de mette en cause dans le détail l’histoire de la circulation internationale des idées politiques liée aux héritiers de Marx, au socialisme international et aux développements idéologiques qui ont fait suite à la 1ère guerre mondiale. Circulation et développements qui prennent racine au Japon dans les années 1920 et 1930 et, avec une force nouvelle, dans la seconde période d’après-guerre. Il est vrai toutefois que dans l’archipel, la popularité des idées de gauche a toujours été discontinue et la tendance dominante va à l’aile modérée. Il y a différentes raisons à cela.

Fin de sélection consultable en ligne. :salut:
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Re: SPECIAL ITALIE, l'autre grand pays de Goldrake !

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Je fais un HS car je reviens en France où, si vous ne le savez pas déjà, des études ont aussi concerné GOLDORAK en tant qu'œuvre véritable. :coeur:
Voici un exemple de colloque tenu il y a un an à la Sorbonne :
http://www.univ-paris3.fr/goldorak-40-a ... 69073.kjsp" onclick="window.open(this.href);return false;

Ici c'était l'appel à communications pour ce colloque :
http://www.afea.fr/CFP-Goldorak-40-ans-apres.html" onclick="window.open(this.href);return false;

:goldo: :fulguro: :fulguro:
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